Charles-Michel CINTRAT
Ciels, terres et eaux… Nous desirons condenser le paysage grandiose et passager, et le fixer eternellement.
Voici les paysages de la Terre que Monsieur Cintrat contemple.
Le chaud et le froid, le sec et l’humide sont, selon la « physique » des philosophes stoïciens, les quatre qualités qui se manifestent et se combinent dans les quatre éléments fondamentaux : le feu, l’air, la terre et l’eau.
N’a-t-on pas là tous les éléments constitutifs du paysage ?
Le soleil, les lumières; les ciels et tous les nuages ; les plaines et les montagnes ; les fleuves et les mers…
Et l’horizon. Cette ligne abstraite, théorique et cependant bien réelle, qui sépare et unit à la fois ciel et terre.
Limite de notre regard ; limite qui, souvent, sous l’influence de la chaleur et de l’humidité, selon les heures, les saisons et les lieux, s’estompe et se dissout, disparaît dans le flou, ouvrant largement la voie au rêve.
Comme en quelque baie de la Mer du Nord, en quelque Causse ou en quelque désert.
Le paysage est une présence indiscutable, indubitable, un condensé du monde. Le désir de le fixer répond probablement au besoin extravagant, prétentieux, et impossible à satisfaire de le condenser encore plus et de mettre à l’abri du temps un état passager. C’est peut-être pour cette raison que les hommes, trop marqués par l’éphémère, n’apparaissent que rarement dans mes tableaux. Lorsqu’ils paraissent (car ne faut-il pas les fixer eux aussi ?) , leur petitesse, face au monde, en est sans doute soulignée, et, s’ils ont pu être l’objet d’autres travaux, c’est pour des raisons peut-être anecdotiques.
Ces arbres, ces édifices ne seront peut-être plus là demain. Si certains sites ont ma faveur, c’est parce qu’ils offrent l’image d’une permanence, pourtant illusoire, elle aussi. Ils ont souvent, en outre, par la pureté, la clarté de leurs lignes, de leurs volumes, l’avantage d’effectuer d’avance le travail d’élucidation, de simplification, pour ne pas dire d’abstraction, qu’exige toute peinture, même celle qui se veut ou se croit la plus réaliste.
Aquarelle, brou de noix, pastel, les diverses « techniques » sont là pour tenter, si cela est possible, de restituer l’impression reçue d’un paysage, son climat, qui importent plus que certains détails formels. Leur combinaison en des associations, qui modifient quelque peu les caractères et les propriétés de chacune d’elles, offrent de nombreuses possibilités. Selon le choix fait de telle ou telle technique pure, de telle ou telle combinaison, c’est un aspect du sujet qui est mis en relief. C’est pourquoi j’aborde souvent un motif, successivement avec différentes techniques, voire de plusieurs « manières ». Je conserve ce qui me paraît correspondre le mieux à ce que j’ai ressenti à chaque étape de mon travail, à mes différentes visions, et que je souhaite communiquer et faire partager.
Charles-Michel CINTRAT
Né en 1929. Habite à Paris.
Initié aux arts graphiques durant les quatre années oùil travailla dans l’imprimerie avant de devenir professeur de philosophie, CINTRAT, qui n’a jamais cessé de dessiner et peindre, approfondit sa technique dans les ateliers de la ville de Paris.
