Épices
Basilic, origan, coriandre.
Cannelle, paprika, garam masala…
Les innombrables épices existant de par le monde sont cantonnées en cuisine au rôle de parfum, de saveur secréte. Lorsqu’on lui ajoute une épice, un plat exhale une splendeur soudaine et son goût prend de la profondeur.
Si le riz remplit le ventre, cela suffit.
C’est pourquoi qu’importe le goût.
Peut-être est-ce ainsi que pensent certaines personnes.
Mais moi, je déteste ce genre de nourriture insipide.
Je préfére expérimenter toutes sortes de saveurs en utilisant toutes sortes d’épices.
Des fortes, des douces.
Cette stimulation est le plaisir même du repas.
Il arrive que de temps en temps une épice ne soit pas à mon goût.
Mais c’est cela la rencontre avec le goût, l’intérêt de la nourriture.
Sans épices, tout devient insipide et triste.
Le lien indéfectible entre ces merveilleuses épices et moi ne reléve pas seulement de l’alimentation.
C’est la vie tout court.
La vie se limite-t-elle au travail ?
Se marier, rester clouée à la maison, se consacrer aux repas et à la lessive, est-ce cela la vie ?
Avec un ordinateur, plus besoin d’amis, plus besoin de rencontres ?
Parce qu’il y a risque de se blesser, doit-on ne plus s’aventurer dans quoi que ce soit ?
Une vie calme, tranquille, sans excitation…
Lorsque j’ai eu l’impression d’être fossilisée dans le travail et la vie quotidienne, je me suis dit ceci.
Si, sur le chemin de retour habituel, je dévie ne serait-ce qu’un tout petit peu, je découvre des restaurants formidables que je ne connaissais pas.
Faire du sport est ennuyeux, mais si je me pousse dans le dos à courir, je me rends compte, je n’imaginais pas à quel point mon corps est vivant et dynamique.
Lorsque je suis fatiguée, j’ai tendance, les jours de congés, à m’enfermer à la maison pour dormir, mais j’avais oublié combien une journée peut sembler longue et bien remplie si je me force à sortir.
C’est cela, c’est bien cela.
La vie, l’existence, peut prendre n’importe quel le saveur au gré de mon humeur.
Un infime état d’âme (est-ce un assaisonnement ?) peut me rendre heureuse ou l’inverse.
Je veux sentir encore davantage mon cœur battre, je veux encore davantage de plaisirs !
Une telle excitation apporte sans doute autant de rires que de larmes.
Un tel sentiment fait sans doute rayonner ma propre personne.
Comme le dit un proverbe japonais : « Même un petit grain de poivre est trés piquant. »
Le poivre, ou plus exactement le poivre – fleur ou clavalier, est une épice depuis longtemps appréciée au Japon.
Le proverbe précédent, « Même un petit grain de poivre est trés piquant » , est utilisé pour évoquer par métaphore une personne dont le corps est de petite taille mais dont l’esprit est acéré.
Passer une existence relevée par les épices, cela ne devrait-il pas me convenir à moi aussi ?
Ce n’est pas seulement pour me contenter de ma situation actuelle, mais c’est sans doute, pour moi sur qui les épices produisent de l’effet, m’harmoniser à merveille avec ma nature.
C’est pourquoi je ne peux même plus envisager une existence sans épices !
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