La mesure du temps dans les images
Pour vous, sur quel principe est basée la notion de temps ?
Pour vous, qu’est-ce qu’un jour ? Une heure ? Une minute ? Une seconde ?
Moi, j’habite au Japon, à l’autre bout du monde.
Et je travaille actuellement dans le monde de l’image.
Dans le monde de l’image, et en particulier pour la télévision japonaise, savez-vous que lorsqu’on parle de “temps”, une seconde est composée de 29,97 plans ? Ceci n’est qu’un système de division de la télévision couleur, c’est celui de NTSC, où 29,97 est l’unité. A ce propos, il existe trois systèmes de division dans la télévision couleur. Il y a aussi le système SECAM en France, et également le système PAL. Pour ces deux derniers, une seconde est composée de 25 plans.
Alors, venons-en aux plans. J’ai expliqué à l’instant que dans le système NTSC, une seconde est composée de 29,97 plans. Or, parce qu’il est compliqué d’expliquer le système avec des virgules, on va dire qu’une seconde est composée de 30 plans. L’important est de considérer que le plan est l’unité qui sert à diviser une seconde en 30.
Connaissez-vous un peu les bandes dessinées ? Quand j’étais encore étudiante et que je m’ennuyais pendant mes cours, je dessinais une image à chaque coin de pages de mes cahiers. En les feuilletant doucement, une animation apparaissait. Après avoir dessiné sur de nombreuses pages, je les faisais défiler sous mes yeux et je pouvais voir s’animer les illustrations que j’avais faites. C’était certes déformé, mais ça s’animait vraiment comme si c’était vivant. J’utilisais les images consécutives, ce même système qui est utilisé dans les dessins animés.
Revenons-en au début de notre propos. Supposons qu’une page de mon cahier soit un plan, alors on peut dire que trente pages de mon cahier constituent finalement le mouvement d’une seconde. Dans le monde de l’image, on gère rigoureusement des instants que l’on appelle plans, soit encore des secondes formées de 30 plans. Il est indispensable d’être très rigoureux quand on manipule des images.
Moi-même, lorsque je m’occupe de mise en scène, je divise les images en plans, puis je les relie. Par exemple, j’utilise le système d'”overlap “, c’est-à-dire que je fais se chevaucher des scènes. Avec ce système d'”overlap”, je peux changer en 15 ou même en 10 plans ce qui en faisait 20 à l’origine. Ainsi, on fait une mise en scène où l’unité est plus petite qu’une seconde et ne la dépasse jamais. Mais, en fait, même si les changements de plans sont infimes, les images que l’on voit, elles, donnent vraiment l’impression de changer. Cela est particulièrement important dans les publicités par exemple, où l’on doit raconter des histoires très brèves.
Dans cette optique, l’image n’est-elle pas un moyen de concrétiser le temps ? Elle est un instrument qui peut matérialiser, même indirectement, à l’aide de formes invisibles, le temps qui est par essence même immatériel. Elle est un procédé qui fixe et retient dans notre monde les choses belles ou désagréables à voir. Voilà la différence de compréhension de la notion de “temps” dans le monde de l’image et dans la vie quotidienne.
Ressentez-vous vraiment l’écoulement inexorable du temps ?
Je voudrais vous reposer la question.
Pour vous, qu’est-ce qu’un jour ? Une minute ? Une seconde ?
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